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Philosophical and scientific Comment

Farabeuf

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Notice

Title: Farabeuf (ID: 348)

Extrait de:
  1:Name: Salvador Elizondo Farabeuf o la cronica de un instante


Internal_Type: Scan
Textual_Type: Fiction
Publication_Type: Printed
Genre: Novel
Event_Alluded: execution by lingchi of the "pseudo Fu-zhu-li"
Original_Text_Language: French

Comment:

Commentaire de Jeab-Pierre Dedieu:

Salvador Elizondo (1932-2006) fut l'un des plus grands romanciers mexicains du XXe siècle. Son Farabeuf est un roman court (180 pages, petit format), qui tire sa rare puissance de la juxtaposition d'une parfaite concision et d'une rare complexité. Il articule en effet plusieurs plans de réalité. Il les expose en de brèves vignettes entremêlées, qui toutes renvoient à la photo célèbre du lingchi de Fu-zhu-li. De sorte que le supplice sert d'axe commun à l'ensemble de l'œuvre.

Farabeuf fut un très grand chirurgien français, professeur en Sorbonne et membre de l'Académie à la fin du XIXe siècle. Tous les étudiants en médecine connaissent les "écarteurs de Farabeuf" qui maintiennent béantes les incisions chirurgicales. Une bonne demi-douzaine d'autres instruments portent son nom. Sa première œuvre, écrite à la lumière de son expérience de chirurgien militaire, De la confection des moignons et de quelques moignons en particulier... (Gallica) assit dès 1871 sa réputation naissante.

Elizondo sublime cette dense matière, en supposant que c'est lui qui prit la photo (plan A) alors qu'il était en Chine afin de constituer pour le compte de milieux réactionnaires une Eglise chrétienne Boxer, dont il proposait de faire du supplicié le Christ; mais aussi afin de suivre une religieuse catholique missionnaire, son amante (plan B). Le narrateur utilisa par la suite la photo pour exciter une autre femme à l'amour, en profitant du trouble délicieux où la jetait le regard extatique du supplicié (plan C). Cette autre femme, bien des années plus tard, attendait son ancien amant, le narrateur, dans un appartement hausmannien délabré à côté du Carrefour de l'Odéon, pour célébrer un rite mystérieux, tournant autour du supplice supposé conduite à l'extase par excès de la douleur (plan D). Cette attente constitue la trame factuelle réelle du récit, qui dure le temps que met le visiteur à monter les marches ; les autres éléments n'étant introduit qu'au titre des souvenirs qu'elle évoque. Attente qui se termine lorsque le narrateur, dont on comprend alors qu'il est Farabeuf, amène son amante à accepter qu'il reproduise sur elle, à l'aide des instruments qu'il a lui-même inventés, le lingchi de la photo, dont il fait d'ailleurs l'hypothèse que la victime fut une femme (plan E)...

Ni sa fascinante virtuosité formelle, ni l'articulation des thèmes qui mobilisent ce qu'il y a de plus profond en l'homme, de la hantise de la mort et du déclin à la Passion du Christ, se renforçant l'un l'autre dans un constant dialogue, ne suffisent à expliquer l'impact de l'œuvre. Celle-ci tire sa force de ce que le fantastique qui y règne en maître, propulse deux éléments historiques, lestés eux de tout le poids d'une réalité effective : le supplice et la personne de Farabeuf. Nous sommes loin des spéculations de Georges Bataille. Nous n'avons pas ici non plus un roman historique au sens de Dumas ou de Walter Scott. L'histoire n'est ni décor ni prétexte. Elle fournit le matériau solide et plein de pesanteur qui leste le fantastique d'un poids inouï de réalité.



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Derniére modification le : 2017-07-23



 
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